Dans une réponse à une petite incursion dans l'histoire de la vallée de la Saoura, à travers un texte sublime emprunté à Leilla Assas et publié dans Babzman, le réalisateur Larbi Lakehal, que j'avais incidemment cité dans mon post, m'a fait cette réponse bouleversante :
Merci cher ami Azziz, je peux dire aujourd'hui après mon passage et cette excellente expérience de Mostaganem, que j'ai gagné une grande amitié dans cette ville dont tu es, Azziz ma grande fierté...Merci pour tout ce que tu as fait pour la réussite de notre projet.
Larbi Lakehal
Ce texte d'une grande densité ne pouvait pas me laisser insensible. J'ai laissé les choses se décanter toute la nuit du 30 et 3 mars 2018. Ce matin, je me suis dis qu'il fallait au moins répondre à cette générosité et le dire en quelques mots. Et puis, au fil des mots, je me suis laissé guider pour produire ce long texte. Comme d'habitude, ceux qui ont la chance de pouvoir écrire le savent très bien, l'appétit se nourris de lui meme. Alors je me suis retrouvé à remonter dans le temps...et parler de quelques instants de félicité que j'ai personnellement vécu dans ma chair au moment du tournage...un aide mémoire à verser à cette formidable épopée, sur les terres singulières des Amarna, à l'ombre bienfaitrice de Sidi Abdallah...Voici une autre page de ce fabuleux projet cinématographique autour de la résistance de la Zaouia Rahmaniya...à travers ses valeureux héros, Si Ahmed Bensalem, Lalla Fadh'ma N'soummer, Cheikh Boubaghla, Cheih Ahaddad, Cheikh Mokrani...et l'incontournable Emir Abdelkader, l'icone de la résistance et le fondateur de l'Etat National moderne...
Mon Cher Lakehal Larbi, merci pour tes mots si gentils envers ma modeste personne...a tes cotés, j'ai appris la générosité, l’abnégation et surtout l'élégance...sur ce tournage très particulier, car traitant d'un sujet dont la portée symbolique est cardinale pour la connaissance de nos combats et de ceux de nos aieux, tu a fais preuve d'engagements feutré et de discernements incisifs...face à l'adversité des éléments et parfois, hélas, des hommes, tu as été la Timonier qui nous a évité les nombreux et si agressifs récifs, pour nous mener à bon port...avec à la clef, avec si peu de moyens et si peu de soutiens, des images et des séquences d'une enivrante beauté...de ce petit hameau des Amarna, tu as réussi la grande gageure de produire de quoi offrir aux publics cinéphile et aussi universitaire, culturel et journalistique, une œuvre d'une insoutenable beauté plastique...et Historique...
Avec ton équipe technique chevronnée,compétente et très disponible,- je cite dans le désordre Zinou, Abdo, Rachid, Tahar, Zoubir, Farida, Nabila...et tous les autres-, tu as su soutirer le meilleur de chacun, pour aboutir à une oeuvre collective d'une troublante intensité...je me souviens aussi de la grande symbiose que tu as créée entre les acteurs et les figurants de Mosta et les habitants du hameau des Amarna et de Sidi Abdallah...je me souviens particulièrement de la première journée à Sidi Abdallah...avec les enfants de Salsabil - clin d'oeil à Hadj Braham Benkritly et à Abed Djamel Eddine Bensaber- lorsque tu as transformé ces freles enfants en véritables acteurs à part entière... je les ai vu frémissants, accepter dans l'allégresse, de troquer leurs tenues, en costumes d'époques...comment te dire mon émotion,comment justifier mes larmes, celles d'un orphelin qui se projette dans son passé et qui se remémore les moindres gestes de soutien...et cette rencontre avec ce groupe d'étudiants, qui une fois dans leurs tenues de soldats français, se mirent à douter...certains voulaient meme ne pas incarner ces militaires sanguinaires venus semer la haine, la mort et les enfumades...et qui se glissèrent sans broncher dans leurs rôles respectifs, acceptant de se partager des selfies, en costumes militaires...cette transformation radicale est le fruit de ton travail...certes, elle ne passera pas à l'écran, mais elle marquera les esprits, car elle a fait franchir à ces jeunes étudiants,une étape considérable, décisive et irréversible...vers la lumière...
Ces hommes des Amarna, venus retrouver leur hameau abandonné et qui se glissèrent avec panache dans les rôles que tu leur avais concocté...à la tombée de la nuit...cette symbiose que tu a parfaitement accomplie, restera dans toutes les mémoires...voir ces centaines de figurants se replonger avec engouement dans le 19ème siècle, prendre individuellement conscience de participer à la réincarnation de faits historiques, n'est pas une mince affaire...que d'y avoir modestement participé, surtout à tes cotés et aux cotés de toute l'équipe de tournage, restera pour moi une belle consécration dans ma quête perpétuelle de réappropriation de notre Histoire chevaleresque...ça n'est pas rien dans la vie d'un militant...surtout que j'avais à mes cotés, ma propre fille Samira, qui a appris plein de belles choses et qui a été fortement impressionnée par le rythme de travail et la grande application osmotique de l'ensemble de l'équipage...Dont tu es le seul et véritable capitaine...Merci Monsieur Lakehal Larbi...le faiseur de miracles...
Aziz Mouats, Mostaganem, le 31 mars 2018.
Voici l'article de Leilla Assas:
Si mon pays m'était conté...
La vallée de la Saoura.
C'est une région enclavée, que l’erg occidental serpente. Située au
sud-ouest de l’Algérie, elle doit son nom à l’Oued Saoura formé par la
confluence de Oued Zousfana et Oued Guir. Les gravures rupestres vielles de plus de 30.000 ans (Ghar diba, la « grotte de la louve ») nous renseignent sur la vie préhistorique, faite d’élevage et de cueillette.
Plus tard, la vallée devint grâce à son emplacement géographique, un passage incontournable des caravanes et un carrefour important, rapprochant la méditerranée à Afrique de l’ouest. On raconte à ce sujet, que le Sultan Noir (Lakhel ) Abû al-Hasan `Alî le sultan mérinide de Sijilmassa y séjourna .
La vallée de la Saoura est reconnaissable entre mille, grâce à ses caractéristiques géographiques, ses couleurs et sa diversité affirmée par la présence d’un sable ocre, qui contraste avec les paysages lunaires des régions du nord-ouest. Le chapelet des ksours de la vallée est quant à lui, le théâtre de célébrations mystiques.
Mysticisme et spiritualité
La vie des ksours s’articule autour d’un mysticisme cultivé depuis des ères lointaines. L’architecture des ksours est vielle de plus de 15 siècles, elle est l’emblème du génie de l’homme qui a réussit à dompter une terre aride et peu clémente. La construction, et l’aménagement des ksours illustrent et consolident la configuration sociale.
Parmi les principaux ksours, on compte celui d’ El Bayadh (el fantasia), on y célèbre encore aujourd’hui la parade des chevaliers, symbole du passé chevaleresque de la région. Par ailleurs, le ksar fut marqué par le passage de Cheikh Bouamama.
L’antique kenadssa, constitue le siège des Ziani, une confrérie fondée par Sidi Mohamed Ziane. La ville forteresse, compte certains édifices religieux tels que la mosquée De Sidi Ahmed Abderhamne, construite au XVII siècle. Aux alentours, Seule Béchar, une ville coloniale anciennement appelée Colomb-Béchar est de création récente .
La fameuse Taghit, dite « l’enchanteresse » la perle du grand erg occidental, est quant à elle célèbre pour la fête du moussem, célébrée au mois d’octobre à l’occasion de la fin des travaux agraires.
Enfin, Beni abbès, constitue l’épicentre de la région; c’est un véritable foyer de pèlerinage, qui chaque année rassemble des milliers de fidèles venus de toute part pour Evènement majeur de la vallée de Saoura.
Toutes les zaouïas des ksours de la vallée se réunissent lors de la célébration du Mawlid (fête religieuse commémorant la naissance du prophète Mohamed); pendant laquelle les principaux pôles spirituels de la vallée de la Saoura ( Zaouia de Sidi M’hamed Ben Bouziane de Kenadsa, de Sidi Slimane Ben Bousmaha de Béni-Ounif, et celle de Sidi Ahmed Benmoussa Moulay de Kerzaz) convergent et célèbrent l’événement. Les bougies ornent les maisons et les chants liturgiques et prières résonnent jusqu’à l’aube .
« Par la célébration du mawlid, la communauté redevient contemporaine du Prophète. Elle « assiste » à la naissance de celui auquel elle doit son existence en tant que communauté ».* Le fait religieux comme vecteur social marque la société, et jalonne la vie quotidienne des contrées du Sahara; lla vallée de la Saoura ne déroge pas à cette règle. Le rite de par sa double fonction : célébration et communion, assure la pérennité du tissus social .
Leilla Assas pour Babzman
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