samedi 25 février 2012

Les patatiers trahis par le gel ...et les spéculateurs



Fellah au Douar Chennana


Plusieurs milliers d’hectares de pomme de terre décimés par les gelées

Les intempéries ayant marqué les deux premières semaines de février ont causé des dégâts parfois irréversibles sur les champs de pomme de terre de la région de Mostaganem et de la plus part des autres zones côtières du pays. Entre 1,5 et 2 millions de quintaux seraient concernés par le pourrissement des parties aériennes de la plante. Des producteurs appellent à l’aide et souhaitent un recours à l’importation afin d’épargner les consommateurs.

C’est une situation jamais observée dans toute la bande côtière du pays, peu encline aux effets du gel. A cela deux raisons, la première ce sont ces gelées interminables ayant sévit durant 7 à 10 jours consécutifs et qui ont définitivement détruit les partie aériennes de la plantes. La seconde, ce sont les semis précoces que de nombreux fellah pratiquent dans le seul souci de récolter le premier et de profiter des prix très lucratifs du marché durant les mois de mars et d’avril. Une troisième raison plus pernicieuse- partagée en l’Etat régulateur et les importateurs de semences- et qui consiste à importer la semence dès la première semaine de novembre. Incitant les fellahs de la bande côtière à semer de plus en plus tôt. Et de faire courir le risque des gelées hivernales. Les dégâts de cette année sont la conséquence directe de ces dérives bien maladroites. Car aucune région du pays n’est à l’abri de la gelée, de surcroit lorsque l’hiver est aussi rigoureux que celui de cette année. Mis à part les rares parcelles proches du littoral- qui ont été plus ou moins épargnées- dans les champs de la plaine intérieure qui s’étale depuis Hassiane à l’ouest jusqu’à Aïn Tédelès, en passant par Aïn Nouissi, Aïn Sidi Chérif, Sirat, Mesra, Bouguirat, Touahria, Saf Saf, Souaflia, Oued El Kheir, Mansourah, Ennaro, Sayada, Kheireddine et Belhadri, les champs de patates offrent une image de totale désolation. Partout, la végétation a été totalement détruite par le gel. Balayé par un vent glacial, le feuillage s’est complètement desséché. La tige principale, maintes fois soumise aux effets du gel, a finit par pourrir. Le plus terrible, constate ce fellah du douar Ezzorg, c’est que la pourriture avance vers la partie souterraine de la tige. Muni d’une simple lame de rasoir, Smain tente bien naïvement d’arrêter la propagation de la pourriture en coupant une à une les parties déjà entamées. Le jeune Charef, venu de Aïn Nouyssi tente de comprendre. Interloqué, il lance à son voisin «  tu ne va pas me dire que tu va couper toutes les tiges une à une, il te faudra y passer toute l’année ?



Le ballet incessant des acheteurs
Ce débat illustre toute la détresse des ces centaines de fellah dont le seul métier est la culture de la pomme de terre. Selon une première estimation, les dégâts devraient concerner pas moins de 80% des champs de Mostaganem. Un fellah chevronné de Sirat, connu pour être le véritable marché national de la patate, soutient que la campagne de pomme de terre est terminée avant d’avoir commencée. Pour ce fin connaisseur des arcanes de cette spéculation « il s’agit de la plus grande catastrophe que la région ait connu, ajoutant que les pertes pourraient concerner entre 1,5 et 2 millions de quintaux ». Un opérateur très impliqué ajoutera que pas moins de 8.000 hectares seraient concernés, ce qui se traduira par une perte sèche pour le pays d’environ 8% de sa production. Même dans la région des Kraïmia, là où s’effectuent les toutes premières récoltes et dont les champs ont été miraculeusement épargné du fait de la proximité de la mer, personne ne pavoisent. 
Du coté de Hassi Mamèche, à moins d’un km de la cote, les champs épargnés par le fléau font l’objet de toutes les attentions. Depuis une semaine, des acheteurs venus de Mascara, d’Aïn Defla et d’Oran, se relaient sans discontinuer pour voir à quoi ressemble un champ de pomme de terre en pleine végétation. Car partout ailleurs, c’est la consternation qui l’emporte. Chez ce jeune cultivateur de Touahria, une région intérieure qui profitait de la brise marine, seules les butes ayant accueilli la semence témoignent encore du désastre. Dans le malheur qui les frappe, les fellah sont comme pétrifiés, mais restent néanmoins solidaires. Certains tentent de s’organiser, mais peu y parviennent. Ce malheur, ils le vivent dans une extrême solitude. Ici, la fatalité et l’humilité semblent gagner tous les acteurs.
Ces fellah ont tout de même l’impression d’être oublié. A Oued El Kheir, Kamel cherche à comprendre : pour moi, dit-il, je ne sais pas si les plantes atteintes de pourritures vont reprendre, je vois poindre ces petits bourgeons latéraux que la pourriture a épargné, mais je ne sais pas si je vais récolter quelques chose ou c’est seulement un mirage » ajoutant que pour lui « ça serait un miracle, car j’ai planté le 16 novembre, soit une semaine après avoir acheté la semence, et à 95 jours, je devrais commencer à récolter ». Au bord des larmes, il jette à terre sa plantule devenue stérile, puis s‘en va vers l’inconnu.

L’importation comme unique alternative 
Puis arrachant une tige, il fait remarquer « qu’à ce stade, les tubercules sont encore à l’état embryonnaire, s’ils devaient reprendre, je ne pourrais récolter qu’avec un mois de retard ».
Sans calcul ni malice, ce fellah a mis le doigt sur l’essentiel. En effet, combien même l’ensemble des champs seraient épargnés par le pourrissement et voir de nouvelles tiges venir remplacer celles détruites, rien ne prédit que la récolte sera au rendez-vous. Car dans le pire des cas, dans l’hypothèse que les jeunes plants reprennent de la vigueur, jamais la récolte n’interviendra avant le mois de mai. Or, à cette période, ce sont les régions de Maghnia, Aïn Defla, Mascara, Boumerdès, Skikda, Guelma et Annaba qui entreront en production. La production de Mostaganem ne sera pas là entre mars et avril pour faire la fameuse soudure. Et c’est là que commenceront les réelles difficultés. Le pays sera en plein campagne électorale et la pomme de terre ne sera pas de la partie. Déjà au niveau des marchés de gros de l’ouest, la patate du Sud – qui est en fin de campagne- et celle parcimonieuse du SYRPALAC – moins de 2500 tonnes dans les frigos de Mostaganem- ne parviennent plus à maitriser les cours qui se rapprochent dangereusement des 100 DA. L’état, par le biais de ses chambres froides a bien stockées quelques centaines de quintaux, mais ils ne seront d’aucun secours pour le consommateur. Cédée à 35 DA, cette patate fait le bonheur des spéculateurs qui la revendent déjà à 65 DA ! 

Un producteur avisé n’exclue pas que « si la situation persistait, rien n’empêchera la patate de se vendre à 120 DA, voire à 150 dans les deux prochains mois ». Dans la région de Sidi Charef, non loin de Bouguirat, un fellah qui passe pour être un leader en matière de pomme de terre, dit « attendre un signe de la part des responsables avant de faire rentrer les tracteurs et labourer plutôt que de continuer à voir ce spectacle insoutenable ». Lui n’hésite pas à préconiser « le recours à l’importation de patates, car même si ça me fait très mal en tant que producteur, je ne vois pas comment vont faire mes concitoyens sans patates ».

La campagne 2012/2013 déjà impactée
Nombreux sont ceux qui souhaitent que l’état de catastrophe naturelle soit décrété et que les fellahs dont les récoltes sont compromises puissent au moins se faire rembourser les frais engagés. Ces frais devraient évoluer entre 10 et 30 millions/hectare, selon l’âge de la culture. Rentrent en ligne de compte, l’âge de la plantation, les couts de la semence, des engrais, du labour et des traitements phytosanitaires. Dans la région, un hectare de pomme de terre mené à terme – entre 95 et 140 jours selon les zones et les variétés- aura engloutie entre 30 et 40 millions de cts. Un multiplicateur fera justement remarquer que ses champs ayant été dévastés, c’est une partie de la semence d’arrière saison qui est déjà compromise. En effet, sur les 110.000 tonnes de semences importées cette année par l’Algérie, environ 10% son destinés à la production de semences pour la culture d’arrière saison, dont les semis commencent en aout. Cette culture couvre au moins 40% des besoins du pays. Si cette semence venait à manquer, c’est la production de la campagne 2012/2013 qui sera en partie compromise. C’est dire combien cet hiver rigoureux aura impacté douloureusement et dans la durée, le monde agricole qui espère une attention particulière de la part de la communauté nationale. 

lundi 20 février 2012

Les larmes du Kerrada


Un ministre sans cravate
La journée avait mal commencé…la venue d’Abdelmalek Sellal, le ministre des ressources en eau de l’Algérie ressemblait plus à une ballade pré-électorale qu’autre chose. En effet, en ce dimanche 19/02/2012, bien avant l’arrivée de la délégation au siège de la wilaya, j’avais croisé un photographe du genre sans gêne…avec ses manières de parvenu, il m’a de suite dégouté d’être rentré dans le bureau d’un responsable au demeurant très affable – ceci expliquant cela- où m’avait précédé un très jeune et sympathique sénateur…si, si, ça existe…j’en conviens, c’est très rare, voire rarissime, pour ne pas dire précieux…mais le jeune Mansour, pensionnaire du palais Ziroud Youcef et natif de Hassi Mamèche est demeuré un jeune homme bien sous tous les aspects…puis voilà que cet énergumène de photographe, apparu dans le sillage du retour en grâce de Bouteflika, fait son entrée fracassante…ne se refusant aucun caprice…il aura vite fait de m’exacerber…je quittes alors le bureau en douceur…à peine le temps de saluer mon hôte et son invité…

On annonce l’arrivée du cortège…puis la silhouette longiligne du ministre apparaît sous les lumières blafardes du matin. Pas de cravate, les cheveux à peine coiffé, Abdelmalek Sellal est très fatigué…comme s’il n’avait pas dormis de la nuit…la paupière lourde, il traine manifestement une méchante conjonctivite à l’œil gauche…l’œil du cœur, ça ne trompe pas. Première halte… l’embouchure odorante de l’oued Aïn Sefra…les eaux usées d’une grande partie de la ville se déverse dans la mer, juste là où jadis se dressait un célèbre restaurant appelé « La Sirène »…inutile de demander autour de vous, très peu de Mostaganémois se souviennent de « La Sirène »…à l’époque, en amont de l’embouchure, il y aurait eut des poissons pour agrémenter l’oued Aïn Sefra…

Après un détour par le barrage du Kramis et une virée poussiéreuse du coté d’Ouled Boughalem, le cortège prend la direction du Kerrada…une immense réserve de 70 millions de M3…prélevés sur l’oued Chéliff à l’aide de pompes allemandes ramenées par un Libanais. Le Kerrada se trouve en contrebas de la forêt de Chouachi et il domine la luxuriante vallée du Chéliff. Enlacé au fond d’une cuvette artificielle, le plan d’eau est absolument magnifique. 

Avant d’arriver sur le promontoire, le visiteur peut admirer un surprenant alignement d’oliviers. Surprenant parce qu’inattendu, mais pas seulement…car lorsque le préposé au projet parle de son volume actuel – un peu moins de 20 millions de M3, il est très facile de deviner que dans quelques mois, peut être dans quelques années, lorsque le barrage sera plein, les oliviers devront apprendre à nager. Votre montagnard de serviteur n’aime pas voir se noyer des oliviers à l’allure si sympathique…
Chez moi, dans l’Algérie que j’aime, on ne se résigne pas à abandonner des oliviers. C’est notre arbre nourricier par excellence…de plus en été, lorsque les cigales se chauffent les ergots au soleil, brebis, chèvres et bergers y trouvent cette fraicheur volatile que seul l’olivier peut donner sans compter…

Journalistes friands…
Très fier de l’ouvrage, le ministre tient une conférence de presse improvisée…à seulement quelques décamètres des oliviers. Autour de lui, une nuée de journalistes, une autre nuée de dictaphones, puis une nuée de questions, aussi saugrenues que plates. La conjonctivite du ministre s’est presque effacée sous le splendide rayon de soleil…et la tournure avantageuse du débat…Abdelmalek Sellal est un ministre plutôt sympa…très porté sur les arts et la culture, il ne dédaigne jamais une digression à travers le Raï et le Malouf…la répartie est toujours servie à profusion…et les journalistes en sont forts friands…
Sans trop forcer, Sellal finit par un détour millimétré par Tamanrasset et son plus grand système d’adduction d’eau du monde…que les Marseillais vont découvrir très prochainement, les veinards…Euphorique, Sellal est presque convaincant lorsqu’il affirme sans sourciller- normal la pernicieuse conjonctive joue aux empêcheurs de  rêver en vase clos- que presque toute la planète nous envie ce système de transfert long de 700 km et jalonné par un florilège de stations de pompage…à travers le Sahara le plus saharien du monde…
Puis, pendant que la corporation des mangeurs – y en a bcp qui sont journalistes- se jette sans retenue sur le buffet, -le quatrième de la journée et il semble plutôt copieux- qu’ils dévorent sans égards…Sellal se prend une communication téléphonique…probablement une interview depuis la province, puis s’éclipse un long moment…alors que l’euphorie semble retomber – surtout chez mes collègues, si affairés à se goinfrer après ce marathon à travers le Dahra- comme sorti de nulle part, voilà enfin un paysan qui pointe le bout de son nez. Je ne sais pas comment il a fait, - moi j’ai ma petite idée-, mais il a de suite reconnu le préfet de Mostaganem qu’il commence par toiser. Puis très vite, face à l’imperturbable commis de l’Etat, le fellah s’emballe…le chef de projet qui semblait être une vieille connaissance de cet « intrus », entame alors une longue plaidoirie…en Français…le wali lui demande de parler dans la même langue que le fellah qui ne cache plus son dégout, ni sa détresse…

Générosité républicaine
Le maire de Belattar, « territorialement compétent », est à son tour rabroué par le paysan, très remonté et très déprimé aussi. Il réclame le payement de son expropriation…depuis une décennie…voilà que Sellal est appelé à la rescousse…très détendu, le ministre commence par taquiner le fellah qu’il semblait connaître, ce que ce dernier n’hésite pas à confirmer…donc deux vieilles connaissances qui se croisent sur ce promontoire, à deux décamètres des oliviers en sursis…s’engage alors entre Sellal et son copain paysan, -mais néanmoins toujours propriétaire des 24 hectares que l’eau du barrage est en train de couvrir inexorablement-…un dialogue. Non ! Deux monologues entre le fellah qui parle de la terre de ses ancêtres et le ministre qui souligne que sans «la « Fridda » point de salut…l’un suppliant l’autre de lui payer son dû et de lui dédommager aussi les effets des explosifs sur sa maison…- pas besoins d’une « Fridda », un simple constat amiable suffirait-, lorsque l’un parle avec gravité de la perte de sa terre, l’autre emprunte au langage de la dérision…


La Cour sans gêne
Une vieille technique qui permet de noyer les oliviers…et qui fait rire aux éclats, les journalistes, les zélateurs et les commis de l’état, repus par les friandises que la généreuse république étale sans compter. Jusqu’au moment où le fellah, la gorge nouée par l’émotion, se retenant avec peine de fondre en larmes, finit par tomber dans les bras du ministre…qui venait probablement de se rendre à l’évidence que ce qui faisait rire la Cour blessait profondément son interlocuteur. La morale veut que l’Etat soit capable d’investir, en moins de 5 ans, plus de 20 milliards de DA lourds pour ériger un barrage de 70 millions de M3 …et oublier de dédommager un fellah pour quelques millions de cts…une note d’espoir presque inaudible : de sa grand mansuétude le ministre a fait obtenir une entrevue chez le wali…avec une ultime recommandation, qu’il s’y rende en compagnie de son avocat et de sa « Fridda »…et une dernière dose de courage…à défaut, il pourra toujours aller se noyer non loin de ses oliviers, un promontoire semble avoir été aménagé à cet effet…juste au milieu de cette étendue d’eau que ses larmes et celles de sa famille ne pourront même pas troubler…
Ils faisaient pitié ces élus et autres fonctionnaires, incapables de saisir l’infinie douleur de cet homme qui a tout perdu sans que ça n’émeuve personne…désormais son sort est confié à la magnanimité reconnue et éprouvée du préfet…lui seul pourra assécher pour toujours ses larmes…pour les sarcasmes de ses compatriotes, même les eaux du Kerrada n’y pourront rien…

UN COMMENTAIRE DE NOTRE AMI HAMOUD ZITOUNI
Merci Aziz d'avoir capté et rendu public un des très nombreux drames que vivent nos agriculteurs. Une administration autiste et imbécile qui "sait" dépenser sans compter des centaines de milliards pour des projets utiles (barrages, autoroute,...) ou hasardeux (rootage absurde et dangereux des parcours steppiques, reboisement bidon, mise en valeur par la concession,....) et qui ne sait pas indemniser un propriétaire-exloitant combien même sous le régime de l'indivision d'où le problème de la frédha (acte déclaratif notarial reconnaissant les héritiers du défunt ou decujus et fixant les parts successorales de chacun des héritiers reconnus). Il est vrai que dans le foncier nos lois sont en retard d'un siècle (code civil, loi d'orientation foncière, loi d'orientation agricole, etc..). Aucun gouvernement et aucune législature ne s'est penchée sérieusement sur le problème de la préservation  et de la régulation de la propriété agricole  pour y trouver solution juste et rationnelle C'est un problème qui touche des milliers d'Algériens ET QUI VA EN SE COMPLIQUANT au fur et à mesure de la démultiplication des héritiers au fil des générations. N'en parlons pas des partages: c'est la loi de la jungle pour les uns ou l'enfer et le déchirement pour les autres.  Dans cette affaire, le wali de Mosta(c'est un homme d'une grande probité et d'une grande expérience), malgré ses pouvoirs proconsulaires ne peut pas régler le problème par un quelconque arrêté préfectoral. Par contre, il peut  faire mettre par la DHW ou la DRAG le montant de l'indemnité d'expropriation sur un compte d'attente (dépôt et consignation) domicilié au Trésor de la wilaya mis à la disposition des héritiers à concurrence de la cote-part de chacun définie par l'acte de la frédha incontournable au vu des textes de loi actuels. A titre indicatif, la rédaction d'une "frédha" peut s'effectuer entre une semaine et plusieurs mois (reconstitution de l'arbre généalogique "descendant" du propriétaire ou possesseur, présentation de l'extrait d'acte de naissance et de décès éventuel de chaque descendant, présentation des témoins, etc..  Une galère!

samedi 18 février 2012

Bon sang ne saurait mentir


Lettre ouverte à Monsieur Nicolas Sarkozy
Nancy, le 2 décembre 2011

Objet : dépôt des cendres du général Bigeard aux Invalides
Monsieur le Président de France,
J’ai l’honneur de vous informer que j’ai adhéré à la pétition demandant le retrait du projet visant à déposer les cendres du général Bigeard aux Invalides. Si de toute évidence, ce général, n’a certes à un certain moment pas manqué de courage, cela ne saurait en aucune façon absoudre l’irréparable. Tout petit déjà, mon père me relatait des séances de tortures que le poète Pierre Emmanuel disait à faire pâlir les enfers ; j’en ai encore aujourd’hui le frisson. Mon père encore me répétait souvent que la torture n’humiliait et n’avilissait que celui qui la pratique ainsi que ceux qui en sont restés les témoins muets, et ce pour quelques raisons que ce soit : la fin ne justifie jamais les moyens (vérité devenue viscérale au cours du long chemin qui l’a conduit des caves de la gestapo à Dachau en passant par le Struthof).
Cela étant, les Invalides n’étant jamais que le reflet de notre histoire avec ses grandeurs et ses turpitudes, je pense en effet que les cendres du général Bigeard pourraient y être déposées dans une urne en forme de gégène afin que chacun puisse se souvenir et se construire (et cela sans repentance aussi ridicule que stérile).
Je vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, au plus profond respect que m’inspire votre haute fonction.
Jean-François Teitgen, Nancy
fils de Paul Teitgen
secrétaire général de la préfecture d’Alger
chargé de la police générale d’août 1956 à septembre 1957
durant ce que l’on a coutume d’appeler les « Événements »
et ancien résistant.

PS : Comme mon père, je sais que si demain je tombe, mon fils sortira de l’ombre à ma place.
PS : Paul Teitgen avait courageusement démissionné de son poste de secrétaire général de la préfecture d’Alger, afin de dénonce la répression et surtout la pratique systématique de la torture et des exécutions extra judiciaires

Mémoires d’enfants d’Algérie



Mes amis et collègues me prêtent souvent une mémoire phénoménale, je n'y prête guère attention, car je suis un peu comme toi...je ne sais pas faire l'effort de me souvenir de bcp de personnes, d'endroits et de faits...pourtant, de ma tendre enfance, je garde des souvenirs impérissables...comme marqués au fer rouge...surtout de mes souffrances et de celle de ma famille...là aussi j'ai droit à quelques quolibets de la parts de certains "amis" qui n'admettent pas...pourtant, de l'enfance je retiens plus de choses que de la vie adulte et celle de maintenant...peut être que je regardes toujours vers le lointain passé...en tous cas merci de cette sincérité toute enfantine que tu a préservée...quoique tu en dises...chez moi le plus dur ce sont les blessures...surtout celles dont on ne parle pas, même pas à sa propre personne...malheureusement j'en ai un bon paquet...je m'en protège par des colères qui ne sont pas toujours appréciées par mes vis à vis...c'est peut être mon coté mec comme le dit si bien et en certitude notre ami Ahmed Saïfi Benziane...oui ,,,oui,,, tu es tjrs présent...et toi impossible de t'oublier...tu es arrivé si tard et tu es si précieux...quand je vois ton nom je penses toujours à un plateau où trône ce marabout du coté de la vallée du Cheliff....avec bcp de cavaliers (tes aïeux) en rang disciplinés, la chéchia au vent, bravant des soldats coloniaux, presque à mains nues...ça c'est de l'histoire, comme quoi la mémoire produit ses propres images qui s'inspirent de la réalité...mais je n'étais pas au débarquement de Normandie... contrairement à Hervé Morin...qui vient de se faire débarquer de la candidature....

...s'il te plait, dessine moi un massacre...colonial...une tribu décimée...à la tombée de la nuit, des enfants fuyuant devant les égorgeurs venus par milliers...Had Chekkala mon amour...tu a donné naissance à la plus terrible tragédie de ce siècle, il y a à peine 15 ans...de toi est Boughiden, ce nom gravé à jamais dans ma mémoire...et ces cris inaudibles d'adolescents miraculés d'une tragédie mais incapables de s'en détacher...ce sont maintenant mes frères de l'enfer...partout des blessures, partout des cicatrices...partout la même résistance, le même acharnement...à affronter la misère et à repousser l'amnésie...Had Chekkala...il y a 15 ans, Béni Mélek...il y a 56 ans...Nekmaria, il y a 167 ans...même pays, même peuple, mêmes souffrances, mêmes résistances...contre l'amnésie...contre la bêtise...seule la mémoire pour dire que la haine n'est plus là...la reconnaissance non plus...haine et reconnaissance se tenant par la main...celle d'une enfance insoucieuse jusqu'à l'ultime massacre...finalement c'est le massacre d'humains par d'autres humains qui imprègne à jamais la mémoire, y compris celle des enfants que nous n'avons jamais été...

lundi 13 février 2012

La civilisation du Chacal

 Le débat honteux sur les civilisations a inspiré Médiapart, le journal en ligne d'Edwy  Plenel...un détour édifiant sur l'action civilisatrice de la France en Algérie... c'est loin d'être exhaustif...à lire et à partager...

 

Un bel exemple de civilisation supérieurement criminelle


| Par Antoine Perraud
Pour comprendre à quel point l'esprit public est encore empoisonné par l'inhumanité coloniale, en France, cinquante ans après l'indépendance de l'Algérie, une petite expérience s'impose. Consultons l'encyclopédie participative Wikipédia, qui donne désormais le « la » du sens commun. Commençons par Changarnier (1793-1877), général qui se présenta sous l'étiquette monarchiste à l'élection présidentielle de 1848. C'était un « Africain » : il avait pris part à la soumission de l'Algérie quelques années plus tôt.
Nulle trace de massacres, selon Wikipédia, mais des « expéditions ». Aucune dévastation, mais des « faits d'arme ». Changarnier ne participe à aucune boucherie mais « se distingue » ou bien « s'illustre brillamment ». En janvier 1840, il « tailla en pièces plusieurs milliers de Kabyles avec 430 hommes seulement ». Admiration à peine voilée. Et rodomontades colonialistes toujours intactes, deux siècles plus tard : « En décembre suivant, le général Changarnier fut chargé de donner une leçon à Ben-Salem, l'un des plus habiles kalifas de l'Émir [Abd-el-Kader]. »
Le père Bugeaud, sans sa casquetteLe père Bugeaud, sans sa casquette
Dérapage occasionnel ? Nenni ! À l'entrée Bugeaud (1784-1849), on attribue au futur maréchal le « massacre » de la rue Transnonain à Paris en 1834, mais on le crédite de la « pacification » de l'Algérie. Tout est à l'avenant. La Moricière (1806-1865) obtint la reddition de « puissantes et turbulentes tribus », puis défendit le camp de Lalla-Maghrnia « contre les envahisseurs » (sic !).
D'où l'extrême bienfait que procure la lecture du livre de François Maspero : L'Honneur de Saint-Arnaud (Seuil). Avec un bonheur d'écriture, une ironie ludique et une hauteur de vue grinçante, le biographe donne toute la mesure d'Armand-Jacques Leroy, dit Achille de Saint-Arnaud (1798-1854). Ce militaire frétilla dans l'ivresse barbare, sous prétexte d'une entreprise poursuivie au nom de la supériorité d'une civilisation sur l'autre...
Voici comment Wikipédia considère Saint-Arnaud : « Sa carrière militaire commence véritablement lors de la colonisation de l'Algérie, comme capitaine de Légion étrangère. En 1837, il se distingue au siège de Constantine et reçoit la croix de la Légion d'honneur. »
La prise de Constantine est l'un des morceaux de bravoure du livre de François Maspero. On piétine dans le sang parmi les effluves pestilentiels : cadavres, cadavres, cadavres... Les assiégés passés au fil de l'épée ; les centaines de femmes qui tentèrent de fuir ce nid d'aigle avec leurs enfants au moyen de cordes qui cédèrent, précipitant ce monde innocent au fond de la gorge du Rummel ; les créatures frappées par l'explosion d'un dépôt de munitions, dont les vêtements en lambeaux tombaient avec les chairs...
Côté français, Maspero rappelle avec une dérision tragique l'ultime réplique du colonel Combes au fils de Louis-Philippe, le duc de Nemours, « qui s'exclame avec le sens de l'à-propos qui le caractérise : "Mais vous êtes blessé, colonel. — Non, monseigneur, je suis mort."»
Saint-Arnaud, dans une lettre à son frère, évoque rapidement le sac de Constantine par la soldatesque puis les officiers venus de France, avant de briser là : « Je ne m'appesantirai pas davantage sur ces scènes de pillages et de désordre ; elles ont duré trois jours. Jetons un voile épais et ne ternissons pas notre gloire et nos souvenirs. »
Saint-ArnaudSaint-Arnaud
Ce voile épais, qui continue d'asphyxier tant de consciences aujourd'hui, François Maspero le déchire. Sa biographie décrit, à travers le cas d'un officier ambitieux, la logique économique et le processus psychique qu'implique la colonisation : le militaire commence par prélever sur le pays les ressources nécessaires au financement de ses frais de campagne, avant de collectionner chevaux, chameaux, femmes et colifichets. D'autre part, pour se désennuyer, il trucide à tour de bras, en une addiction touchant au plaisir, des populations réifiées ; on finit par mêler l'agréable au profit quand Bugeaud instaure une « prime à la tête » : tout soldat touche un pécule en échange d'un crâne arabe sorti de sa gibecière...
Cette façon de trancher, c'est la conséquence fatale de l'impossibilité, pour le colonisateur, d'ôter des esprits autochtones tant d'idées malheureuses. Saint-Arnaud se désole des vies et visions arabes : « On se demande comment tout cela existe ; et quand on pense au peu de besoin qu'ont ces gens-là, on a bientôt vu l'extrême dificulté de les civiliser. Ils ne comprennent pas la vie plus heureuse. Donnez-leur un lit, ils couchent dessous ; bâtissez-leur une maison, ils bivouaquent dehors. Que faire avec de telles gens ? »

Chacal un jour, chacal toujours

Parfois, un doute passager s'infiltre. Comme à Djidjelli, au mois de juin 1839, quand Saint-Arnaud raconte, toujours à son frère : « Ces Kabyles sont les soldats les plus braves de toute l'Afrique. Il y en a qui sont venus sur nos pièces et qui ont été tués par la mitraille à deux pas. Le cadavre du père était tombé, les deux fils se sont fait tuer dessus à coups de baïonnette. Ce n'est pas si sauvage, en civilisation on ne fait pas mieux que cela. »
Statue et plaque au jardin Saint-Arnaud, à Victoria, en Australie (cliquer pour agrandir)Statue et plaque au jardin Saint-Arnaud, à Victoria, en Australie (cliquer pour agrandir)

Seuls les vaincus, surtout s'ils trépassèrent, méritent ce brin de considération. Malheur aux résistants ! Et d'abord au premier d'entre eux, Abd-el-Kader, qui a le don d'exaspérer Saint-Arnaud : « Qu'une espèce de chef de bandits comme cela ose se mesurer avec la France, la tienne en échec et la traite sur le pied de l'égalité. » L'égalité apparaît comme une provocation insupportable aux yeux d'un colonisateur, qui finit par croire que son crime est un sacrifice : « Bien des braves ont arrosé de leur sang cette terre stérile », rapporte Saint-Arnaud, à propos des pertes françaises au col de Mouzaïa...
Dopée par cette dose de bonne conscience, la colonisation s'avère engrenage militaire, technique, politique et mental, dans une répétition des crimes les plus monstrueux du XXe siècle en Europe. C'est ainsi qu'il faut comprendre cette notation d'Alexis de Tocqueville, défenseur de l'œuvre française au sud de la Méditerranée : « Du moment que nous avons admis cette grande violence de la conquête, je crois que nous ne devons pas reculer devant les violences de détail qui sont absolument nécessaires pour la consolider. » François Maspero rappelle comment Tocqueville avait repoussé l'idée d'une extermination, jugée fautive – la main n'avait-elle pas été trop lourde à l'encontre des Indiens d'Amérique ? Le penseur libéral recommandait de simplement « comprimer » les Arabes.
Saint-Arnaud devient l'instrument des « violences de détail ». Il participe à une destruction économique, humaine et culturelle (Abd-el-Kader pleure en découvrant sa bibliothèque anéantie, qui contenait des manuscrits uniques sauvés de Grenade ou de Cordoue). L'officier vide les silos, incendie les récoltes, coupe dattiers et arbres fruitiers, pille le bétail, détruit les habitations pour faire mourir de froid d'entières populations, ou bien enfume des êtres réfugiés dans des grottes : « Je me sentais un peu boucher », finira par noter le soudard à légion d'honneur, futur maréchal de France (1852).
Mais pas question pourtant de céder un pouce à « la philanthropie » (on ne disait pas encore « droit-de-l'hommisme »), qui s'exprime en France à l'encontre des crimes supposés civilisateurs : « Comment ! nous sommes en Afrique à ruiner notre santé, exposer nos jours, travailler à la gloire du pays, et le premier venu pourra nous insulter, calomnier nos intentions, nous prêter des sentiments coupables qui ne sont pas du siècle et ne peuvent appartenir à un soldat. Arrière, insulteurs publics ! »
Bugeaud avait ainsi justifié la guerre totale devant la Chambre en 1840 : « Il faut une grande invasion semblable à ce que faisaient les Francs, à ce que faisaient les Goths. » Et Changarnier développait la même logique folle (soyons barbares pour mieux humaniser !) : « Après avoir ruiné Abd-el-Kader et dispersé ses troupes, nous devons nous attaquer à la fortune mobilière et aux récoltes des tribus pour les convaincre de se soumettre. Une civilisation meilleure donnée à ces belles contrées doit être notre justification aux yeux des hommes et le sera, je l'espère, aux yeux de Dieu. »
Tout est résumé par cet échange entre deux braves grenadiers en train de plumer une volaille, au soir d'une opération assez rude :
« Les pauvres diables se souviendront de notre visite. — Que veux-tu ? Nous leur apportons les lumières, seulement nous leur faisons payer la chandelle un peu cher. »
Et Saint-Arnaud de confesser à son frère : « Je deviens inflexible, je deviens Turc, c'est effrayant ! » Ce pressentiment le poursuit : « Je suis devenu sauvage, j'ai besoin de voir le monde pour redevenir civilisé. »
Le bientôt général reviendra à Paris, pour, en vain, tenter de liquider la foule révolutionnaire de février 1848. Nommé ministre de la guerre par Louis-Napoléon Bonaparte, il permettra la réussite du coup d'État du 2 décembre 1851 en mitraillant « la canaille ». Victor Hugo devait écrire de Saint-Arnaud, dans son Napoléon le petit : « Ce général avait les états de service d'un chacal. »
Voilà, condensée par le Poëte, la terrible logique, ravageuse de corps et de consciences : qui sème en Afrique le vent colonial, récolte la tempête au cœur de l'Europe. Se faire la main sur des martyrs périphériques conduit sûrement à des proies plus centrales. Chacal un jour, chacal toujours. La bestialité déployée là-bas, déjà, menace ici. Les assassins sont à peine parmi eux, que les voilà parmi nous : un tel retour de manivelle est imparable.
Aimé Césaire l'a édicté : « Nul ne colonise innocemment. » Les prétendus civilisateurs supérieurs ne sont que des graines de criminels, ballottées du nord au sud par un Mistral perfide, puis du sud au nord par un Sirocco machiavélique. Pourquoi donc, à leur sujet, pousser le moindre cocorico ?...







François Maspero : L'Honneur de Saint-Arnaud, réédition d'une biographie parue en 1992, agrémentée d'une préface d'Edwy Plenel et d'une seconde de l'auteur, à l'édition algérienne (2003) de son ouvrage (Seuil, 412 p., 24 €)



jeudi 9 février 2012

Les Ksours sauveront l'Algérie...du FMI

Note guide Med Hennine
Ain Ouarka où le sel de la terre
Pour la première fois que je passe le nouvel An dans le Sud, avec ma fille et en compagnie d'un groupe multicolore et multiconfessionnel, j'ai eut bcp de peine à retrouver mon rythme une fois revenu dans le Tell...depuis, j'essaie de retrouver mes repères mais j'ai bien acquis la conviction qu'on ne guérit jamais du grand Sud....alors je ne cesse d'en parler autour de moi et j'essaie déjà d'organiser une autre visite avec des artistes, des poètes, des chercheurs et surtout des étudiants en agro mais également en architecture et en géologie...je connaissais un peu la région des Ksours pour y avoir effectué quelques séjours auprès des éleveurs de moutons, ces nomades sédentaires qui savaient accueillir et qui savaient surtout être généreux de leur temps mais aussi de leur passion pour ces espaces semi désertiques. Mais ces séjours s’étaient toujours déroulés au printemps...mais là, en plein hiver avec de surcroit de la neige sur les montagnes qui enlacent Ain Sefra – le Djebel Mekhter au sud et le Djebel Aissa tout juste au nord, avec un pic de 2236 mètres et un parc national de plus de 24.000 hectares-...il y faisait un froid polaire avec des nuits claires, des millions d'étoiles et durant le jour un ciel si bleu que même les yeux de Denis Martinez s'y seraient noyés...j'ai trouvé d'anciennes cités presque entièrement conservées, des gens besogneux et surtout très heureux de retirer du sel de la montagne non loin du lac d’Ain Ouarka...
une station thermale à l'écart de tout. Mais qui apporte les
Marché D'Aîn Sefra
sels minéraux si indispensables à l’homme mais surtout à ses animaux. Car le sel d’Ain Ouarka, que de rudes sédentaires soutirent au prix de mille efforts de la montagne, est sans doute le produit le plus prisé des éleveurs du Grand Sud. Des camions entiers sont livrés aux marchés de la région, là où les nomades vendent leurs troupeaux et s’approvisionnent en fourrages mais surtout en ces précieux cailloux de sels que des touristes déboussolés prélèvent sans égards pour ceux qui vont l’extraire du fond de la terre…comme s’il s’agissait d’un vulgaire caillou juste susceptible d’orner le coin d’une cheminée…il suffit de voir les nombreux puits creusés à ciel ouvert par des mains calleuses pour comprendre que les filons ne sont pas à la portée de n’importe quel quidam. Avant de rencontrer la précieuse roche, combien de tonnes d’argile et de pierres sont déplacées à coup de pioche et de pelle, combien de journée de dur labeur, avec la hantise d’un éboulement qui ensevelirait hommes et animaux. Car sur le flan de la montagne de sel, ce sont les paisibles ânes qui forme
le sel d'Aïn Ouarka
nt une chaine de solidarité avec l’homme pour que des tonnes de sels partent tous les jours combler les besoins des chèvres, des moutons et des dromadaires. Les plus anciens et les plus fidèles alliés de l’homme du désert et d’ailleurs…
Un lac souterrain, poissonneux et étrange
En contournant le djebel Mekhter  pour rejoindre Moghrar, on est fortement impressionné par le changement du couvert végétal, mais pas seulement. A quelques encablures d’Ain Sefra, la route longe un oued que les montagnes abruptes enlacent au point de l’étouffer. Mais dès qu’il en a l’opportunité le court d’eau n’hésite pas à s’étaler au point de devenir une large rivière avec un lit qui fera pâlir de jalousie le Cheliff et La Mina réunis. Si bien qu’à la première occasion, les deux berges s’éloignent pour laisser libre court à la furie des eaux. Meme si lors de notre passage, seul un filet d’eau persistant continue de maintenir l’espoir, il est aisé de remarquer que la largeur de la rivière dépasse par endroit la centaine de mètres….absolument ahurissant pour un algérien du nord, habitués aux parcours sinueux de nos oueds. Déjà au niveau de la ville d’Ain Sefra, l’oued éponyme, au demeurant fort célèbre puisque ce lors d’une de ses crues que la sémillante Isabelle Eberhardt se laissera emporter par ses flots sauvages…et une rivière souterraine où vivent des poissons millénaires.. là c’est déjà Moghrar Tahtani avec ses palmiers majestueux, son village en toub et son musée dédié à Cheikh Bouamama, le dernier résistant...après Fadhma N'soumer....nous avons marché sur les traces du dinosaure de Sfissifa...une cité millénaire qui ferait pâlir de jalousie à la fois Venise et Grenade...avec son système d'égouts vieux de plus de 9 siècles et toujours fonctionnel, et des galeries à ne plus en finir...une vieille vigne d'au moins 150 ans...qui est en train de vivre ses derniers printemps...seul un cultivateur avisé pourrait la tirer d'affaire et en tous cas au moins lui donner une descendance...rien que pour elle je reviendrais à Sfissifa...ma curiosité ampélologique finira par m'y contraindre...pour ce qui s'apparente dans notre langage à un désert...franchement il ne faut pas se laisser abuser...jamais je n'ai eut autant l'impression que le désert est dans nos tetes et dans nos comportements....enclavée entre deux chaines de montagnes, l'immense plaine qui relie Sfissifa -à la frontière avec le Maroc- à l'ancienne cité médiévale de Asla ou à la vallée de Ouarka où prend naissance un oued, il y a suffisamment de terres fertiles pour éviter à l'Algérie une pénurie alimentaire...il y a  de l'eau à profusion. Ce sont les chaines de montagnes qui servent de réservoir. Les cimes situées parfois à plus de 2200 m d'altitude –taquinant avec condescendance le Djurdjura, le mont Chélia et le majestueux Assekrem- ne sont jamais à court de neige durant l'hiver. Alors que les versants Sud, entièrement balayés par les rayons d'un soleil plutôt bienveillant, éprouvent de la peine à entretenir la moindre végétation, les versants Nord, complètement à l’abri durant cette saison, ne se privent jamais du burnous blanc qui donna leurs nom aux Pyrénnées....Normal que dans la vallée, des multitudes de ruisseaux fédèrent leurs efforts pour donner naissance à de larges oueds. Pas aussi éphémères que çà, d’ailleurs, puisque Hammou, notre guide me signalait que la source qui entretient les thermes de Ouarka aurait un débit de 90 l/seconde….La morphologie des sols aidant, une grande partie de ces eaux finit par rejoindre des nappes phréatiques que le génie de l'homme saharien aura sut faire fructifier en érigeant de somptueuses oasis que l'Algérie algérienne ne sait pas encore exploiter dans le durable. Dromadaires et moutons, par troupeaux entiers, s'échinant à longueurs d'années à y brouter les moindres végétaux. Le comble est là devant nous: de belles vaches pie noire ou normandes font leur apparition...de vraies colonies de bovidés sont en train de terminer le travail de massacre que l'homme moderne ne veut plus assumer. Comme s’il s’agissait d’une autre planète…Un matin, nous avons été conviés à violer l’intimité des dunes qui surplombent Ain Sefra. Arrivés face à l’hôtel public, nous nous engageons, comme de braves citadins à franchir les dizaines – centaines ?- de mètres accumulées par les dunes.
Dune d'Aïn Sefra

Au delà les dunes d'Aïn Sefra
Très vite, mes souvenirs de montagnard de Béni Mélek viennent à mon secours. Un jeune Djidjélien qui s’attaquait frontalement et dans une juvénile insouciance à la pente raide que la dune dressait devant lui, finira par me persuader que seule une avancée en lacets pouvait faciliter l’accès à la cime des dunes. En effet, au bout de quelques pas, le jeune homme bien intentionné se mettra  quatre pattes, comme un vulgaire animal. Avec ma fille qui déjà redoutait l’obstacle, nous nous engageons à prendre la dune par son flanc. Ce qui flatta la dune qui y trouva apparemment un certain plaisir. Elle se prêtera avec délicatesse à nos pas mesurés qui lui écorchaient la peau sans jamais la saigner. Ayant suggéré à ma fille de mettre ses pas sur mes traces, je l’assurais d’une assise certaine. Lentement, nous finissons au faîte de la dune. Un léger vent glacial balayait nos visages et la rareté de l’oxygène commençait à se faire sentir. Mais l’effort en valait bien la chandelle car à nos pieds, l’oasis d’Ain Sefra s’étendait à perte de vue. Le temps couvert menaçait de s’assombrir, sur les montagnes, les gros nuages avaient de la peine à se déplacer. Puis soudain, un rayon de soleil parvient à se frayer un mince passage entre les gros nuages. Une partie de la ville en fut illuminée, juste le temps d’ajuster quelques clichés, puis la lumière s’estompa. La ville éternelle retrouvera cette lumière blafarde qui annonce toujours l’orage. Pendant un cours instant, je me suis retrouvé dans ma région natale, là où la forêt est si dense et la pluie si généreuse que même le napalm de l’armée coloniale n’était pas parvenu à en décimer définitivement le tapis végétal…incontestablement, la région des Ksours mérite toute notre attention et toutes nos forces…
Les légendaires COINGS de Tiout











Les intempéries sont dans nos têtes
Moi je continue de croire fermement que la neige est un atout majeur pour comprendre les défis agronomiques de la région des Ksours...je suis comme toujours mis en minorité....sans avoir été écouté...que nous réserve l'avenir...quelle date retenir pour une prochaine virée?   c'est le plat pays...jusqu'à quand allons nous continuer à tergiverser??? tout le monde ne semble pas apprécier l'état de déliquescence de l'université algérienne...

il ne faut pas croire qu'il suffit de claquer des doigts pour que tous les chercheurs s'engagent...ce qui est pathétique chez nous c'est que peu de gens ont conscience des besoins du pays....lors de la réunion d'une dizaine d'enseignants d'agro...j'avais justement insisté sur le fait que nous allions d'abord aller à Naama pour apprendre et que moi qui ne suis pas un adepte du LMD, je trouvais que cette affaire de Naama serait une excellente opportunité pour asseoir enfin une ligne directrice pour que le LMD ait quelques chances de s'incruster dans les sciences agronomiques...et de se trouver une voie vers quelque chose qui se tienne...et qui devra nécessairement déboucher sur une action de développement qui dépasserait la chambre agro de Naama, l'université et l’économie algérienne...car jusqu'à présent, ce système a été très mal apprécié par nos universitaires....il ne suffit pas de faire du copier-coller, comme c'est malheureusement le cas pour la grande majorité des parcours...ce déplacement est une grande opportunité pour entrainer les jeunes agronomes vers des horizons qui leur ouvriront des perspectives sur la sécurité alimentaire du pays...et des clés pour nous éloigner de la dépendance alimentaire…il me souvient qu’en 1973, je débarquais à Annaba sur le périmètre du Bou Namoussa....il y avait 8000 vaches laitières qui n'avaient pas de quoi se nourrir, les experts n'avaient pas tenu compte du froid qui allait ralentir la croissance des fourrages d'hiver (Bersim et orge)   il a fallu ramener du fourrages sec depuis El Khémis et Ain Defla par trains entiers...du jamais vu en Algérie...déplacer des bottes de foin sur 700 km...juste pour donner à manger aux vaches que l'on venait d'importer...j'espère que nous n'aurons pas perdu du temps...et refroidi les tièdes ardeurs de nos amis...Ksouriens…mais pas seulement…

samedi 4 février 2012

les tourments d'un appelé du contingent


que cherche-t-on en refusant de célébrer le 19 mars ?


article de la rubrique
les deux rives de la Méditerranée > cinquantenaire
date de publication : vendredi 3 février 2012



« C’était à la fin février 1960 peut-être le 26, c’est-à-dire le jour de mes 20 ans. C’était l’après-midi. J’étais dans ma classe de CM1 à l’école de La Plaine à Bédarieux. Envoyé par Monsieur Espitalier, le directeur du cours complémentaire, qui était aussi le directeur de l’école primaire, un élève est venu m’apporter un courrier. Il s’agissait de ce que dans la région on appelait “la billette”. C’était l’avis de mon affectation pour effectuer mon service militaire. Il m’était ordonné de me rendre au Camp Sainte Marthe le 1er mars à Marseille afin de prendre le bateau pour Oran ... (lire la suite) »
Nous reprenons ci-dessous deux extraits récents du blog de cet ancien appelé pour faire la guerre en Algérie. En espérant qu’il fait erreur quand il affirme « qu’il n’y a pas de dialogue possible avec des gens qui n’ont rien appris et rien oublié ! »

2012 : le cinquantenaire de la Paix en Algérie

[Le 29 janvier 2012] – En 2012 c’est le cinquantenaire de la fin de la guerre d’Algérie. Mais qu’en retiennent donc les médias ? L’exode des Pieds Noirs, certes douloureux, et le sort, dramatique, des harkis sont l’essentiel de ce qui a été retenu.
Ce qu’ont été les cent trente deux ans de colonialisme dont huit d’une guerre atroce est gaillardement passé à la trappe. La misère du peuple algérien, ce qu’ont vécu les appelés du contingent engagés dans un conflit qu’ils désapprouvaient, tout cela est évacué !
On continue à refuser de chercher ce qui était en cause et on ne retient que la blessure de certains. Que fallait-il donc faire ? Poursuivre encore la guerre comme y engageaient l’OAS et les Pieds Noirs que cette organisation fascisante conditionnait ?
Dans le journal La Provence comme dans Le Figaro on a choisi son camp, celui du refus d’analyser ce qu’étaient le colonialisme et ses conséquences désastreuses. Pas d’examen de ce qui frappait à la porte de l’histoire. Pour les appelés du contingent, morts inutilement sur le sol africain, il n’y a pas eu le choix. Pour eux c’était le cercueil, il ne leur a pas été proposé la valise ! De même pour les martyrs algériens qui sont tombés, en bien plus grand nombre, pour l’indépendance de leur pays.
Que cherche-t-on en refusant de célébrer le 19 mars, date de l’application des Accords d’Evian et du cessez-le-feu ? A regretter la fin de la guerre et son cortège d’horreurs ? Nice Matin donne une piste : le 30 juin 2012 à 17 heures, lors de l’inauguration du Monument aux Rapatriés, « les regards des pieds-noirs et des harkis se tourneront vers la Promenade des Anglais, se fixeront sur le trottoir sud, face à la mer. » Pour un peu on les engagerait à partir à la reconquête de ces trois départements français que De Gaulle a lâchement abandonnés à l’ennemi !
Mais quel jeu jouent donc les médias en ce cinquantenaire de la paix en Algérie ? A préparer les esprits à exporter la civilisation occidentale en Iran, Syrie, Corée… comme nous avions su le faire en Indochine, à Madagascar, en Afrique (et plus récemment en Libye ou en Côte d’Ivoire)… ?
C’est vrai que le recours à la guerre serait une solution pour maintenir en état un système économique et social à bout de souffle !
JPEG - 27 ko
Bouclage d’un douar

“La valise ou le cercueil” à Zinga Zanga

[Le 23 janvier 2012] – Sans que la salle soit pleine il y avait beaucoup de monde pour assister à la projection du film de Charly Cassan et Marie Havenel. Je me suis fait tout petit et je me suis glissé subrepticement dans le public sans faire de vague. Je n’étais pas au milieu d’amis !
Ce n’est pas un film historique mais un film de propagande. Il entend réécrire la saga de l’Algérie en gommant de larges pans de ce qu’elle a vécu. Le plus patent sans doute c’est l’absence dans les images des appelés du contingent qu’on avait pourtant envoyés par centaines de milliers dans les opérations de maintien de l’ordre. De l’ordre colonial bien entendu !
Mais le colonialisme non plus, on n’en parle pas. Le débarquement à Sidi Ferruch le 14 juin 1830 ? Certes l’affaire du coup d’éventail reçu par le consul Duval est reconnue pour ce qu’elle est, un prétexte ! Non, Alger est un repaire de Barbaresques qui se livrent au commerce des esclaves et, condamnation sans appel, d’esclaves blancs. Parce que quand il s’agit de noirs on est moins regardant et la Traite des Nègres à laquelle s’est livrée la France pendant des siècles est une peccadille !
Les Européens viennent mettre en valeur un pays laissé à l’abandon par les autochtones qu’au demeurant l’armée française a libéré des Ottomans et de leurs janissaires. Ils sont très bien les colons, respectueux des premiers occupants, de leur religion, de leur mode de vie, de leur identité… Ils ne sont quand même pas accueillis à bras ouverts et il faudra attendre 1847 pour obtenir la reddition d’Abd el-Kader.
Les événements de Sétif et de Guelma le 8 mai 1945 ? Ce n’est pas si dramatique qu’on l’a dit. Européens et Maghrébins auraient dû fêter en communion la victoire sur le nazisme. Quelle idée de poser alors la question de l’indépendance de l’Algérie ?
Oui, pourquoi les Arabes et les Kabyles voulaient cette indépendance ? Ils n’étaient pas bien avec tout ce que la France leur apportait en matière de civilisation ? Il faut croire que ces populations sont masochistes !
Ah, la Légion qui défile à Sidi Bel-Abbès ! Elle le fait dans un ordre parfait qui inspire la confiance. C’est que dans ce pays on a quand même besoin en permanence de la force armée et ça date de la conquête de l’Algérie !
L’histoire va s’accélérer en 1954. Oui, le terrorisme aveugle c’est atroce mais pourquoi ne s’est-on pas interrogé sur ce qui l’engendrait ?
Du coup d’Etat ramenant De Gaulle au pouvoir en 1958 aux journées des barricades à Alger en 1960 jusqu’au putsch manqué d’avril 1961 on assiste aux soubresauts d’une guerre qui n’en finit pas.
Pourtant le 19 mars 1962 c’est le cessez-le-feu, quelque chose d’insupportable pour la majorité des Pieds Noirs qui le 26 mars répondent à un mot d’ordre de l’OAS et se font massacrer dans la rue d’Isly. Ce jour là j’étais à Géryville, j’ai été témoin de violences faites aux Algériens qui manifestaient leur joie par des militaires d’origine Pied Noir qui n’acceptaient pas cette évolution des choses.
L’exode ? Oui c’était sûrement douloureux mais pouvait-on s’empêcher de penser qu’il aurait fallu d’autres rapports entre les communautés que celles qui avaient prévalu pendant cent trente deux ans de colonialisme dont huit d’une guerre atroce et quelques mois d’une politique de terre brûlée pratiquée par l’OAS, à Oran notamment ?
Les harkis ? Mais dans quelle galère les avait-on embarqués ? Pauvres gens qui se sont fait avoir par ceux là même qui prétendaient les défendre ! J’ai connu le camp du Plô de Mailhac à Saint-Pons-de-Thomières. On y avait reproduit les mêmes mentalités que sous la domination coloniale ! On ne gagne jamais rien à se soumettre à celui qui vous domine !
Je ne suis pas de ceux qui ont porté De Gaulle sur les fonts baptismaux et je rappelle que sous son autorité la guerre a duré plus de temps que sous tous les autres dirigeants de la République. Que voulait-on de plus ? Continuer la guerre ?
Le retour, au cours de voyages du souvenir, de Pieds Noirs en Algérie a encore des relents de racisme. Sans eux c’est la ruine ! Et n’oublions pas non plus cette appréciation d’un Pied Noir qui a choisi l’Espagne pour s’y installer après l’indépendance de l’Algérie « On a été bien accueillis par Franco ! »
Je crois sincèrement qu’il n’y a pas de dialogue possible avec des gens qui n’ont rien appris et rien oublié !


Le 50ème anniversaire sur l'autre rive


Pendant que l'Algérie s'agrippe à confectionner le plus grand nombre de partis politiques de l'univers, c'est en France que le demi siècle d'une indépendance chèrement acquise met en place une série de manifestations qui feront certainement la part belle aux "Nostalgériques". Ce qui n'empêchera pas les authentique démocrates Français ainsi que les amis de l'Algérie d'y participer avec clairvoyance, rigueur et  perspicacité. Ci dessous, le programme de la LDH, section de Nice, haut lieu du néocolonialisme et de  la droite revancharde et ringarde...

L’indépendance de l’Algérie : manifestations multiples, mémoires croisées


article de la rubrique
les deux rives de la Méditerranée > cinquantenaire
date de publication : lundi 30 janvier 2012



C’est parti pour commémorer le 50e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. C’est parti mais de ce côté-ci, en France, en attendant qu’Alger se souvienne que c’est bien [aux] Algériens, de marquer cet événement et de procéder à un bilan critique des 50 dernières années.
[Mis en ligne le 26 janvier 2012, mis à jour le 30]


Manifestations multiples et mémoires croisées

[ DonneTonAvis.fr, le 26 janvier 2012]

L’Algérie, son histoire, ses parcours récents sont au cœur de nombreuses rencontres, et il y a de tout dans ce foisonnement de commémorations. Il y a ceux qui fêtent la libération mais il y a, aussi, les nostalgiques qui donnent l’impression qu’ils espèrent encore reconquérir leur « terre perdue ». Evocations de quelques-unes seulement de ces rencontres, en attendant d’en présenter d’autres.
Paris, la capitale, n’a pas le monopole des manifestations du 50e. Sur deux jours – les 10 et 11 mars – à Nîmes, un colloque qualifié d’« historique » sera consacré à « la fédération de France du FLN, 1954-1962 ». Ce n’est pas une mais un collectif d’une dizaine d’associations qui ont l’initiative de cette rencontre : l’Amicale des Algériens du Gard, l’Association des Algériens du Languedoc-Roussillon et de l’Aveyron, l’Association républicaine des anciens combattants, Coup de Soleil Languedoc- Roussillon, France-El Djazaïr, France-Palestine Solidarité, Institut d’histoire sociale, CGT du Gard, Mouvement de la paix et solidarité 30. Ces acteurs s’attelleront, au cours de ce colloque de 2 jours, à faire le point de la recherche historique sur la présence du FLN sur le territoire français, aspect qui, disent-ils, « comporte encore de nombreuses zones d’ombre ».
Ali Haroun, Gilbert Meynier, Linda Amiri, Marc André, Emmanuel Blanchard, Didier Lavrut, Bernard Deschamps, Sylvie Thénault ou encore le sénateur Mostefa Boudina. Des conférences ouvertes à débats avec le public ponctueront ce colloque et traiteront, cela va de soi, du rôle de la Fédération de France du FLN et des spécificités de son combat, de la condamnation à mort des patriotes algériens et leur exécution par la guillotine dans les prisons françaises ou encore du collectif des avocats du FLN en France et des « itinéraires de groupes de choc entre la Wilaya III et la 8e Région militaire ». Un documentaire El Bi’r (Le puits) de Béatrice Dubell consacré à des récits d’engagements anticolonialistes à Lyon et notamment celui de l’abbé Carteron sera projeté aux participants en présence de la réalisatrice. Par ce colloque, les organisateurs veulent « contribuer à éclairer, sur des faits essentiels, un moment de l’histoire des peuples français et algérien et favoriser ainsi les relations amicales entre l’Algérie et la France ».
Précédant cette rencontre et dans le même esprit, la section de Nice de la Ligue des droits de l’Homme tiendra un colloque le 11 février prochain intitulé « Algérie 1962 : pourquoi une fin de guerre si tragique ? » Les conférences inscrites à ce colloque ne manquent pas d’intérêt et les questions sont probablement pour la première fois posées aussi clairement. Ainsi, l’historien Gilles Manceron démarrera la rencontre en s’interrogeant « Pourquoi une issue comme en Afrique du Sud n’a-t-elle pas été possible ? » Il sera suivi par Jean-Pierre Peyroulou, docteur en histoire, qui traitera de « la violence des ultras de l’Algérie française de 1945 à 1962 ». Cette « Fin de guerre vue par les Algériens » est ce à quoi le sociologue et universitaire algérien Abdelmadjid Merdaci consacrera son intervention. La question des mémoires occupera la seconde partie de cette journée. L’Historien Yann Scioldo-Zûrcher s’interrogera si « l’histoire des rapatriés d’Algérie et la mémoire des pieds-noirs sont-elles compatibles ? ». Quant à Benjamin Stora, il évoquera « les mémoires blessées de la guerre d’Algérie ».
Les journalistes ne sont pas en reste. Ainsi, Pierre Daum, auteur de Ni valise ni cercueil aux éditions Actes Sud, un livre qui remet les pendules à l’heure, consacrera justement son exposé à « Ces Européens restés en Algérie après 1962 ». Et pour clore ce colloque, une table ronde dont le thème se veut résolument optimiste portera sur « France-Algérie, l’avenir se construit déjà ». Son modérateur, notre confrère Hassane Zerrouky, sera entouré de Fatima Besnaci-Lancou la présidente de l’association Harkis et droits de l’Homme ; de Jean-François Gavoury, président de l’Association des victimes de l’OAS, et de Jacques Pradel de l’Association des pieds-noirs progressistes et de leurs amis. Pierre Tartakowsky, président de la Ligue des droits de l’Homme, clôturera le colloque. C’est de mémoire aussi qu’il sera question dès cette fin de mois de janvier. Le 31 janvier à Paris, au théâtre de Chaillot, le journal en ligne Mediapart organise une rencontre intitulée « Mémoires franco-algériennes : 50 ans ». La soirée animée par Edwy Plenel réunira Mehdi Lallaoui, président de l’association Au nom de la mémoire, Fatima Besnaci-Lancou, Florence Dosse et Benjamin Stora, ayant tous pour point commun, dit Edwy Plenel, « celui d’être des enfants de cette mémoire, harkis, pieds-noirs, indépendantistes et appelés ».
Comme chaque année, l’association Sortir du colonialisme organisera sa semaine anti-coloniale, qui sera en grande partie consacrée cette année au 50e anniversaire de l’indépendance algérienne. Dans ce cadre, du 23 février au 11 mars, au musée Montparnasse à Paris 15, de multiples manifestations seront consacrées à « La censure à l’époque coloniale ». Les visiteurs pourront ainsi voir des films d’époque censurés, des livres et autres documents interdits par le régime colonial.
Lundi 13 février 20h, théâtre de l’Odéon (Paris)

Pour le 50e anniversaire de la fin de la guerre d’Algérie
Soirée exceptionnelle Algérie(S) [1]

- Projection : Méditerranées, film d’Olivier Py (France, 2011, 32 min)
Réalisation et scénario Olivier Py, montage Lise Beaulieu, son Jean-Noël Yven
« L’ensemble de mon travail au cinéma comme au théâtre est une interrogation sur l’identité de « méditerranéen. » Olivier Py
Exhumés après vingt-cinq ans, des films 8 millimètres donnent lieu à une méditation sur le destin d’une famille et d’une génération. Méditerranées est une autofiction, l’histoire d’un couple, d’une famille, qui se confond avec l’Histoire de l’Algérie et de la France des années 1960, sur lequel Olivier Py porte un regard à la fois lucide et nostalgique.
- Spectacle : Le Contraire de l’Amour, Mouloud Feraoun, Journal 1955-1962 (Seuil, 1962)
avec Samuel Churin et Marc Lauras (violoncelle)
version scénique et mise en scène Dominique Lurcel
lumière Céline Juillard, scénographie Gérald Ascargorta, costumes Angelina Herrero

Cinquante ans plus tard, le Journal (1955-1962) de Mouloud Feraoun apparaît comme la lente érection du tombeau de toutes les illusions : celle du discours « civilisateur », celle de l’impossible entente, celle d’un avenir réconcilié. Mais aussi comme une formidable leçon de courage intellectuel, un garde-fou pour aujourd’hui face à la toute-puissance de l’irrationnel, une parole irréductible à toutes les langues de bois d’où qu’elles viennent, dressée face à tous les silences, toutes les zones d’ombre qui pèsent encore.
Nice, vendredi 10 février à 18h30
Le spectacle : Le Contraire de l’Amour, Mouloud Feraoun, Journal 1955-1962 (Seuil, 1962) sera également joué à Nice le 10 février, à 18h30, dans le cadre du colloque organisé par la Ligue des droits de l’Homme.
Forum des images

La guerre d’Algérie, images et représentations

Mardi 31 Jan 2012
  • 14h30 l Le Coup de sirocco d’ Alexandre Arcady
  • 16h30 l La Blessure, la tragédie des harkis d’ Isabelle Clarke et Daniel Costelle
  • 18h30 l La Question de Laurent Heynnemann En présence du réalisateur
  • 19h00 l Les pieds-noirs Conférence de Yann Scioldo-Zurcher Entrée libre
  • 20h30 l Algérie, histoires à ne pas dire de Jean-Pierre Lledo En présence du réalisateur
  • 21h00 l Les Oliviers de la justice de James Blue
Mercredi 1 Fév 2012
  • 14h30 l Peuple en marche de René Vautier
  • 16h00 l Cartouches gauloises de Mehdi Charef
  • 18h30 l En finir avec la guerre de Mehdi Lallaoui En présence du réalisateur
  • 19h00 l Les Algériens Conférence de Gilles Manceron Entrée libre
  • 20h30 l L’Ennemi intime de Florent-Emilio Siri En présence du réalisateur et de Patrick Rotman
  • 21h00 l Gamila l’Algérienne de Youssef Chahine
Jeudi 2 Fév 2012
  • 09h00 l “Guerre d’Algérie et médias” Journée d’études Entrée libre
  • 14h30 l Mon colonel de Laurent Herbiet
  • 17h00 l Paroles d’un prisonnier de l’ALN de Salim Aggar En présence du réalisateur
  • 19h00 l Transmission de la mémoire, écriture de l’Histoire Table ronde Entrée libre
  • 21h00 l La Chine est encore loin de Malek Bensmaïl

20 Aout 55, les blessures sont encore béantes

  Propos sur le 20 Aout 1955 à Philippeville/Skikda  Tout a commencé par une publication de Fadhela Morsly, dont le père était à l’époqu...