jeudi 3 mai 2018

Une agriculture pragmatique, est-ce trop demander?



Dans une élégante contribution, en marge des scandaleuses assises sur l'agriculture à l'initiative du gouvernement, nous notons les propos très mesurés et très rassembleurs (voir en infra le texte de Sid Ahmed Ferroukhi à l'université de Tlemcen) de Ferroukhi Sid Ahmed ... ex ministre de l'agriculture, actuellement député d'Alger...et c'est loin d’être négligeable comme approche pragmatique...Un économiste qui devient pragmatique c'est tellement rare qu'il est jouissif de le souligner. Cependant, et de nombreux intervenants l'ont souligné, il reste qu'en dépit de toutes les contraintes, il existe une petite lame de fond qui fait que le pays arrive à maintenir une réelle croissance dans la filière. On le doit à la conjonction de deux facteurs: celui de la vigueur du marché, la consommation des ménages reste forte et la demande se maintient malgré la dérive du dinar...et celui de la réelle capacité des acteurs - petits fellah et exploitants de plus grande envergure- à s'approprier des techniques et des intrants de l'agriculture productiviste des pays avancés...Bien entendu, il apparait clairement que cela se fait en l'absence quasi morbide de la formation et de la recherche agronomique...tout récemment, grâce au groupe Syngenta, nous avons pu voir des étudiants de l'Ecole Nationale Supérieure Agronomique -ex INA d'El Harrach, en villégiature chez des fellah de la région de Mascara, exalter la qualité du couscous offert généreusement par leurs hôtes...aucun commentaire sur les cultures, les techniques, les rendements, les fléaux, les intrants, les marchés, les surplus, la main d'oeuvre, la mécanisation, la viticulture, l’œnologie, l'oléiculture, la greffe pastèque sur courgettes...l'élevage des vaches américaines à Brézina...dont plus personne ne parle...curieux tout de même! Merci Monsieur le ministre au sourire ravageur...il faut garder espoir....le barrage du Fergoug est envasé à 99,99%...et les agrumes de Mohammadia se laissent distancer par d'autres régions...enfin la zone des Bordjia qui continue d'engloutir des millions de tonnes de tuf...pour la sortir de l'eau...du moment que le couscous était bon...comme si on pouvait encore douter des potentialités culinaires et patriotiques des gens de Mascara...dont les plus téméraires ont migré vers le sud est sans crier gare...


Aziz Mouats Mostaganem le 03/05/2018





Contribution de  Ferroukhi Sid Ahmed


LES AVENIRS ... DE L’AGRICULTURE EN ALGÉRIE ?
Penser et débattre de l’avenir de l’agriculture et de la transformation des produits agricoles en Algérie ? Est la question centrale posée par le séminaire National organisé à l’initiative du département des Science agronomiques de la faculté des sciences de la nature et sciences de la terre de l’Université de Tlemcen.
Plusieurs approches sont alors possibles pour répondre à cette question :
- Penser ce futur à partir du passé présupposant une linéarité et une projection à l’identique de l’existant …
- Penser ce futur en intramuros, en excluant le monde, ses influences, ses évolutions ….
- Penser ce futur englué dans nos difficultés techniques, nos retards de performances dans certaines filières sans remise en cause de nos modèles de production et d'accompagnement …
- Penser ce futur en se préoccupant des raréfactions des ressources naturelles : le foncier, l’eau, les patrimoines génétiques… mais en oubliant le devenir socio-économique des anciens,nouveaux et futurs : agriculteurs, éleveurs, pêcheurs, des petits et grands d’entre eux. Ils sont les principaux acteurs de la sécurité alimentaire durable …
- Penser ce futur autour d’une démarche administrative donnant peu de place aux acteurs, à leur intelligence naturelle , à leur liberté d’agir, d’innover et les condamnant à un rôle de figurant passif de leur propre avenir …
- Penser ce futur dans une démarche classique, valorisant jusqu’à l'épuisement des ressources conventionnelles oubliant leur « alter ego » non conventionnelle dans les domaines de l’eau, de l’énergie, de la terre …etc.
- Penser ce futur dans une approche techniciste, fragmentaire reproduisant des modèles de croissance, d’intensification agricole, de consommation alimentaire, de développement des produits ultra transformés…
- Penser que les impacts des changements climatiques sur l’Afrique du nord ne demanderont qu'une simple adaptation des enseignements , des savoirs agronomiques et des pratiques agricoles ...
- Penser ce futur sans ses nouveaux outils et matériaux : l'intelligence artificielle, la révolution digitale , les objets connectés, la robotisation et l'automatisation ...
- Penser ce futur en pensant que l'on peut tout acheter : modernité , innovations, technologies et savoir faire et savoir être ...
S’inscrire et faire le choix d’une prospective de la sécurité alimentaire durable en Algérie impose de s’éloigner de ces orientations sus décrites et des avenirs non souhaitables quelles engendrent.
Il faut privilégier plutôt des démarches innovantes, ouvertes, centrées et impliquant les acteurs, anciens et jeunes , valorisant les nouvelles ressources non conventionnelles, permettant l'appropriation des innovations , appuyant la création de nouveaux savoirs agronomiques, mobilisant les intelligences naturelles et artificielles , revisitant les modèles de croissance en préservant les diversités naturelles, humaines, et les finalités de santé humaine et des écosystèmes …
« Il faut protéger le futur, du passé … » Laurent Haug , expert , Management Innovation
(par Sid Ahmed FERROUKHI, mai 2018)

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