lundi 6 décembre 2010

L’Adieu à Hadj Boukli


panoramique de l'ITA ( au fond 2 nouvelles bâtisses) Photo DR
(cliquer sur la photo pour agrandir)

Inéluctable est la mort. Insoutenable est notre destin. Mais nous n’avons d’autres choix que de l’assumer. Après tout nous avons eut un parcours très particulier. Tout le monde n’a pas eut la chance de participer à l’expérience de l’ITA. En 1970, Mostaganem était une coquette mais modeste ville de moins de 70.000 habitants. Avec l’encadrement et le personnel de soutien, environ 500 personnes, il y a avait deux promotions, soit près de 900 jeunes de tous horizons. Cela faisait du monde dans la ville. L’enseignement c’était pas moins de 8 heures par jour, tous les jours. La cafétéria était tenue par Hadj Bouchachi au cercle Fromentin, qui deviendra quelques temps après le siège du Planning, un service où Nicolas allait exceller, après avoir mis sur rail « la vie collective » avec Bouzid Mezardja. A midi tapante, c’était la ruée vers le restaurant. C’est le royaume de Hadj Boukli. Les cuisines étaient sous la responsabilité directe de Hadj Maâta, beau père de HBA Benzaza et transfuge de l’hôpital de Mostaganem. Déjà aux premières lueurs de l’aube, le café était toujours accompagné de gâteau secs, de beurre et de confiture. C’est là que je découvrais pour la première fois la « noix de beurre » que l’on façonne avec une cuillère spéciale. Hadj Boukli qui nous gâtait comme pas possible, avait une très belle formule. Il disait toujours «  la première promo c’était beurre et confiture, la deuxième promo ce sera beurre ou confiture ! Mais c’était plus tard lorsque les effectifs atteindront les 2000 élèves ingénieurs et après que Hadj Maâta ait rejoint l’hôpital. Pour tout dire, nous étions choyés comme des princes. On dirait que Hadj Boukli avait une mission spéciale, celle de ne jamais nous froisser. Il avait cette autorité à nulle autre pareille de privilégier toujours ses élèves au détriment de tous les autres. Pour lui l’élève ingénieur avait toujours raison et il avait tous les droits. Il était le premier à ouvrir le restaurant et le dernier à le quitter. Jamais sous son règne les élèves ne seront brimés. C’est à l’arrivée de Benosmane, un autre enfant de Tlemcen que les choses se compliqueront entre lui et Hadj Boukli. Rapidement, les rapports entre les deux responsables étaient devenus exécrables, ce qui incitera HBA  à les séparer. C’est alors qu’un mauvais matin, Hadj Boukli se retrouvera à la tête des moyens généraux. Là aussi, il fera montre d’une abnégation et d’un engagement à toutes épreuves. L’homme était droit dans ses bottes. Auréolé de sa filiation avec Nordine Boukli, son neveu, alors SG du ministère et très proche de Tayebi Larbi, il était l’intransigeance personnifiée. Rigoureux comme une règle, fier comme un léopard, Hadj Boukli avait une seule famille, celle de l’ITA. Contrairement à tant d’autres, cette passion il la maintiendra jusque dans son exil. Jusqu’à ces dernières années où ses forces le lâchaient inexorablement, jamais lors d’un bref séjour à Mostaganem il ne fit l’impasse sur l’ITA. Nous sommes des milliers à lui vouer une admiration sans limite et un respect légitime. Je l’ai connu en ma qualité de délégué auprès de l’intendance, donc de l’intérieur du système, et je suis sans doute le mieux placé pour le connaître dans ses moindres recoins. Je ne peux rien faire d’autre que de dire qu’en face de lui, je n’ai jamais senti ni mépris, ni félonie, ni malice. Il était juste et parfois excessif dans sa justesse. C’est pourquoi, à jamais, il le savait parfaitement, je lui serais redevable de quelque chose. Je suis convaincu que je ne suis pas seul à partager ce sentiment. Mais s’il y a en un qui l’a connu et compris parmi les milliers d’élèves de l’ITA, je serais celui-là que ça ne m’étonnerait pas. Je dirais même que j’en tire une certaine fierté. Car il n’est pas donné à tous le monde de pénétrer le monde intérieur de Si Boubaker Boukli Hacène Thani ! Adieu l’artiste ! Tu nous a toujours manqué, car ton amour pour le travail et pour les « ITA » se confondaient allègrement. Tu étais vraiment des nôtres ; tu partageais nos joies et nos peines. Désormais nous serons bien seuls. Il reste ta mémoire que nous honorerons comme le ferait un de tes fils. C’est le plus bel hommage, d’autant que tu savais à quel point nous tous te respections. C’était la page de Hadj Boukli, sous la plume de Boussayar. 

Je me joins à tous les collègues qui ont connu feu El Hadj Boukli pour exprimer à sa famille mes sincères condoléances, tout en priant Dieu le tout Puissant de l'accueillir dans son vaste paradis.
Bouzerzour

1 commentaire:

  1. Très fier et très touché à la fois pour cette aussi sincère pensée, pour ce lourd et affectif témoignage à la mémoire de notre regretté Hadj Boukli qui nous a marqué par son décès demeurant au fin fond de nous telle une présence qui nous hante par les souvenirs de sa bravoure, de ses qualités, de sa bonté, de sa gentillesse et sa sincérité qui panse plus qu'elle ne blesse.
    Le frère, l'ami, le père des sept à soixante dix sept ans sans réticence ni complexe aucun, pourvu que le travail marche et soit bien réalisé pour le bon fonctionnement de l'ITA et la satisfaction de ses étudiants.
    Qui osera dire ou penser le contraire de ce que vous avez fait ici savoir ? Les étudiants, les responsables administratifs et techniques, les agents de tous corps confondus, les vsna, les enseignants et bien d'autres personnes qui l'avaient côtoyé et obtenu gain de cause à chaque fois qu'un service lui avait été demandé.
    Que d'aventures, que d'anecdotes vécues à ses côtés dans le serieux et l'ingénuité et qui hélas ne seront que bons souvenirs avais-je dit. Tout comme vous Mr Mouats, nous lui sommes redevables de bien des choses et lui témoignerons à tout jamais notre indeterminable respect, notre parfaite reconnaissance et lui disons: Nous t'avions aimé, nous t'aimeront encore plus...
    Merci à vous Mr A.Mouats
    " Hamdenita "

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