Où l'on apprend l’extrême complexité du blé...et sa grande générosité...
Le séquençage
d’un ancêtre du blé pourrait augmenter les récoltes modernes
Un consortium international de partenaires publics et privés
travaille au séquençage du génome de l’amidonnier sauvage, un ancêtre du blé
moderne, en vue de rendre les variétés de blé moderne plus saines et plus
résistantes. L’amidonnier sauvage est un blé riche en nutriments et l’une des
premières cultures à avoir été domestiquée il y a environ 10 000 ans au
Moyen-Orient. « Le blé amidonnier sauvage peut être naturellement croisé
avec le blé domestiqué, ce qui en fait une source potentielle pour
l’amélioration du blé », explique Assaf Distelfeld, généticien du blé à
l’Université de Tel-Aviv en Israël, et principal chercheur du projet. Le
transfert de traits de l’amidonnier sauvage riche en micronutriments au blé
panifiable pourrait réduire la malnutrition parmi les populations dont le
régime alimentaire est basé sur cette culture. Le blé procure actuellement près
d’un cinquième des calories consommées dans le monde. « De plus, nous
espérons identifier des gènes qui permettent au blé de mieux pousser dans des
environnements rudes, et ainsi améliorer la sécurité alimentaire », ajoute
Distelfeld. Cependant, l’assemblage du génome est une tâche compliquée,
puisqu’il est beaucoup plus complexe que le génome humain. Une fois qu’il sera
terminé, les données seront librement accessibles, indique le consortium. Selon
Justin Faris, phytogénéticien au Service de recherche agricole du Département
de l’Agriculture des États-Unis, « Le séquençage du génome de l’amidonnier
sauvage sera une réalisation scientifique majeure qui aura des répercussions
profondes sur notre capacité à produire des variétés de blé améliorées pour la
résistance à la sécheresse et aux ravageurs. Les variétés à haute performance
qui en résulteront procureront davantage de nourriture à la population mondiale
en pleine expansion »
Rappels sur la domestication des blés
Rechercher l’origine du blé tendre, espèce hexaploïde, revient à évoquer
l’ensemble des blés historiquement cultivés, diploïdes, tétraploïdes et hexaploïdes,
et à identifier leurs ascendants sauvages ainsi que leurs sites de
domestication.Toutefois, cette question n’est pas facile car, d’une part, il
existe de considérables modifications morpho-physiologiques entre les blés
cultivés actuels et leurs ancêtres, et, d’autre part, seul un petit nombre
d’entre eux est actuellement cultivé dans les mêmes territoires que ceux où ils
ont été domestiqués.
En ce qui concerne la localisation de la domestication des blés, on
considérait jusqu’à aujourd’hui qu’elle avait eu lieu dans le Croissant
fertile, vaste territoire comprenant, selon les auteurs, la vallée du Jourdain
et des zones adjacentes d’Israël, de la Jordanie et de l’Irak, voire de la
bordure ouest de l’Iran. Récemment, des scientifiques israéliens (Lev-Yadun et
al., 2000) ont suggéré, sur la base de divers éléments botaniques, génétiques
et archéologiques, que le creuset de notre céréaliculture se situerait en une
zone plus limitée dudit Croissant fertile, localisée autour de l’amont du Tigre
et de l’Euphrate, dans des territoires actuels de la Syrie et de la Turquie. En
effet, les progéniteurs des sept cultures fondatrices du Néolithique – engrain,
amidonnier, orge, lentille, pois, vesce et pois chiche – se trouvent
simultanément, ainsi que le lin, uniquement à l’intérieur de ce périmètre, même
si la distribution des ancêtres du blé tendre dépasse ce cadre à l’est comme à
l’ouest. De plus, hors de cette zone centrale, il n’existe pas pour l’heure de preuves
archéologiques de formes domestiquées de céréales et de légumineuses antérieures
à la période 7300 – 7000 av. JC, ce qui paraît confirmer son antériorité.
L’ancêtre sauvage, T. monococcumL. ssp. Aegilopoides (Link) Thell., de
l’engrain cultivé,T.monococcum L. ssp. monococcum, a été découvert en Grèce
pour la première fois par Link en 1833 qui le décrivit initialement sous le nom
de Crithodium aegilopoides. L’espèce fut identifiée comme l’engrain sauvage par
Gay en 1860 (Boissier, 1884), tandis que T. urartu Tum. Ex Gand., espèce voisine
donneuse du génome (AA) de l’amidonnier sauvage fut repérée en Arménie en 1937
par Tumanian. L’ancêtre sauvage,T. turgidum ssp. Dicoccoides (Körn. Ex Asch
& Graebn.) Thell., de l’amidonnier, T. turgidum ssp. dicoccon
(Shrank) Thell., et du blé dur, T. turgidum spp. Durum (Desf.) Husn, à
génome 5BBAA) fut découvert sur herbier, en Autriche, par Körnicle dans la
moitié du XIXe siècle tandis que les formes cultivées et sauvages de
T. timopheevii (Zhuk.), furent repérées, entre 1923 et 1932, par Zhukovsky,
Tumanian et Jakubziner (Jakubziner, 1932) au nord de la mer Caspienne.
Cette découverte des progéniteurs sauvages de l’engrain et de l’amidonnier
aboutit à la première classification naturelle des blés (Shultz, 1913), bien vite
renforcée par les premiers travaux de phytogénétique (Sakamura, 1918) qui
aboutirent à la détermination des nombres chromosomiques des différents blés :
les blés cultivés, et leur apparentées, ont alors été classés par les
botanistes en trois groupes principaux : les blés diploïdes (engrain ou petit
épeautre – 2n = 14), les blés tétraploïdes (amidonnier, blé dur, blé poulard,
blé de Pologne, blé de Perse – 2n = 28) et les blés hexaploïdes (épeautre, blé
tendre, blé hérisson, blé compact – 2n = 42). Des études ultérieures de
cytogénétique mirent en évidence que les différents blés formaient une série
allopolyploïde avec X = 7 (Feldman et al., 1995) et permirent d’en préciser les
relations. La figure 1 expose l’état actuel de nos connaissances.
Ainsi, c’est seulement dans la seconde moitié du XXe siècle
qu’il est devenu clair pour la communauté scientifique qu’il n’existait pas
d’ancêtres sauvages des blés hexaploïdes et que les blés hexaploïdes cultivés
résultaient d’hybridation spontanée entre blés tétraploïdes cultivés et espèces
sauvages diploïdes.
Lien : http://www7.inra.fr/dpenv/pdf/bonjed21.pdf
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