dimanche 13 février 2011

Un olivier s’est envolé



Une fulgurante maladie vient de priver la famille universitaire de Mostaganem de l’une de ses valeurs les plus sûres et les plus assidues.  La soixantaine à peine entamée, Mohand Ouali vient de nous surprendre en nous quittant sur la pointe des pieds. Comme le ferait une mole d’Hélium, il a pris son envol vers des cieux plus cléments. Brillant élève du lycée Djamel Eddine el Afghani de Mascara durant les premières années de l’indépendance, le très turbulent élève se fera connaître par des aptitudes hors du commun. Compagnon de Hamma, le frère ainé de Brahim Senouci, il sera aussi connu pour sa droiture exemplaire en qualité de maitre d’internat. Après un rapide passage à l’université d’Alger, il partira vers la verdoyante Bretagne et c’est au Campus de Beaulieu, -université Rennes I- qu’il entamera une thèse dans les très spacieux labos du département de chimie. Il avait ramené de la paisible et besogneuse Bretagne, outre une thèse de doctorat, un sens aigu du travail bien ficelé et surtout un profond humanisme. Ayant séjourné sur les berges de la Vilaine, il m’arrivait souvent d’aborder avec lui les autres facettes du patrimoine breton. Nous gardions tous les deux une affection particulière pour le marché des Lices qui se tenait tous les samedis. 
une vue de la place des Lices (Rennes) par jour de marché

C’est incontestablement le marché le plus pittoresque de Rennes, avec ses alignements sans fins de fleuristes et de poissonniers. Il était très difficile pour un étudiant studieux de ne pas fréquenter ce marché qui se tenait sur les bords de la Vilaine, juste à l’entrée de la vieille ville. Que de fois nous parlions des fameuses et non moins succulentes crêpes bretonnes que des artistes attentionnés préparaient en un tour de main. Il y avait également toute une panoplie de poires et de pommes aux gouts si exquis. Lors de nos rares rencontres, nous trouvions toujours le temps de nous retremper dans cette ambiance, souvent pour oublier nos douleurs indigènes. Car, l’homme avait une volonté inébranlable et une honnêteté irascible. 

Difficile alors de s’en tenir à une grande rigueur sans écorcher certaines accointances. Indéniablement, l’homme avait gardé de sa Kabylie ancestrale outre le sens de l’honneur, une certaine droiture qui lui donnait de l’altitude. Intraitable sur la déontologie, il avait une sainte horreur des passe-droits, du favoritisme, de l’incompétence, des manigances, des trahisons et des manquements. Je l’ai toujours apprécié pour sa droiture et son honnêteté intellectuelle. Autant je l’appréciais, autant il ne se gênait point pour me dire que par moment il me trouvait un peu nonchalant, voire conciliant. Venant de sa bouche, ce n’étaient que douces politesses…

L’homme était droit dans ses bottes et limpide dans ses convictions. S’il est parti sans faire de bruit, ce n’est pas tant par la fulgurance de la maladie que par son incapacité à lui négocier la moindre indulgence. Sous son allure débonnaire, l’homme tenait la dragée haute à toutes les tentations et à toutes les complaisances. Il avait une très généreuse idée de son pays, de son université et de sa chimie. C’est un pur hasard si lors de la dernière rentrée solennelle, on lui fit appel pour une conférence d’ouverture dont il s’acquitta avec brio. Car personne ne pouvait imaginer qu’il venait de faire une intervention testamentaire, nous invitant à une prise de conscience sur les risques que nous faisons courir à notre planète. Maintenant qu’il est bien installé sur sa constellation, il peut enfin rire de nous qui l’avions à peine effleuré dans cette vie nécessairement trop courte; autrement, on s’en lasserait trop vite ! 
Un bouquet de fleur au marché des lices à Rennes
Malheureusement pour ceux de ses collègues qui sont encore là pour un temps, le testament est très contagieux et l’héritage est en péril. D’a Mohand, l’homme de conviction, n’est plus là pour nous le rappeler. Une pieuse et amicale pensée à sa famille ! Chapeau bas l’artiste ! Jusqu’à l’ultime instant, tu nous auras toujours surpris…au point que même tes plus proches n’ont pas eut le temps de te voir partir…sur la pointe des pieds, fier comme un olivier narguant les siècles.

Témoignages:
Je me souviens très bien de Ouali, de Charrier, près de Saïda. Je suis bouleversé de retrouver sa trace en même temps que j'apprends l'annonce de sa mort. C'était un type bien, au sens premier du mot. C'est vraiment une impression étrange. Je ne l'ai même pas reconnu de prime abord sur la photo mais ça a été un éclair après. Je l'ai revu tel qu'en lui-même. Il y a tellement de gens qu'on a côtoyés, dont on a partagé un moment de l'existence, dont on ne sait plus rien aujourd'hui.
Paix à son âme. Brahim SENOUCI


Je me souviens très bien de Ouali, juste après son recrutement au sein de l’université de Mostaganem il est venu me rendre visite a l’ISMAL ou nous avons démarré quelques travaux de recherche en océanographie physique sur la baie de Mostaganem. Je suis bouleversé d'apprendre l'annonce de sa mort. C'était un type bien et pleine de volonté, qui m’avait donné une très bonne impression en tant que scientifique. Je  l'ai reconnu sur la photo, il n’a pas tellement changé, mes derniers entretiens avec lui remontent entre 1980-1983. Je vous prie de transmettre mes condoléances a sa famille et à ses proches.
Pr. A. Chouikhi

Salut Aziz.
 Triste nouvelle.
 Je m'associe à la douleur de ceux qui ont connu Mohand Ouali.
Je me suis permis de transmettre une copie de ton texte à Hamid BOUKEROUI.
 Porte-toi bien Aziz.
 Cordialement, Madjid Akli.

Très touchant. Nous ne sommes que passagers sur terre. B. Abdelhay.

J'ai étais émue par ton témoignage, que le professeur Ouali repose en paix. Il a gagné le sommeil du juste maintenant!!!! Dalila Boudouma.

Mes sincères condoléances à la famille du Professeur OUALI, ainsi qu’à toute la
Communauté Universitaire Algérienne…..
Le Professeur OUALI est un grand Maître!!!
Quel dommage!!!
Mourad ARIBI, Université de Tlemcen.

C'est avec beaucoup de tristesse que je viens d'apprendre cette douloureuse disparition de da Mohend
Merçi monsieur MOUATS pour le texte que vous lui avez consacré en hommage, un hommage témoignant de votre attachement à l'élite intellectuelle de notre pays.
Farid  AIT OUALI 


  Un monsieur dont la grandeur n'avait d'égal que son humilité. Modeste et sage: voici le souvenir que je garde de ce grand homme que j'ai eu le privilège d'interviewer il y a quelques années au sujet de la protection de l'environnement...Allah yerhmou inchaallah. Farida Tilikete
Mon  cher  Aziz ,
La perte d'un ami est une épreuve difficile .Elle l'est  plus  quand il s'agit d'une personne qui nous est  très proche ,que l'on  a souvent côtoyée avec qui on a partagé tant de souvenirs au pays comme  à l'étranger .Elle l'est encore davantage quand le professeur distingué qui a dispensé son savoir  nous quitte  et quand il nous laisse en legs ses valeurs morales et humaines qui nous auront marqués et qui resteront à jamais gravées .
Pour cette raison ,cher ami ,je m'associe à ta douleur et serais très honoré si tu pouvais faire parvenir à la famille du défunt mes condoléances les plus attristées .  Sadek  Belhamissi              





1 commentaire:

  1. C'est avec beaucoup de tristesse que je viens d'apprendre le décès de notre professeur Mr OUALI Mohaned Said
    Recevez nos plus sincères condoléances.
    Quel dommage pour la mort de notre lumière de la chimie !!!!!!!
    ELLAHOUMA YRHAMHOU W YJAALHOU MIN AHLI ELJANA.
    Mohamed Amine BELMEKKI

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